Le premier soir de mon retour en France, quand j'ai rencontré la petite grange de mes voisins, j'ai su que j'allais en faire un théâtre d'images. Ils m'ont donné carte blanche, j'ai attendu qu'ils partent en vacances. Tous le mois, cette promesse de magie m'a tournée dans la tête. J'ai cherché des robes de mariées, une maman qui avait rêvé d'être une princesse m'a prêté son costume de petite fille comblée. J'ai voulu un marié, un jeune homme inconnu à accepter de se joindre à la valse de mes imaginaires. J'ai espéré des visages d'enfants, mes plus jeunes fans m'ont aidée à gonfler des ballons et ont tournoyé dans la cabane devenue enchantée. Il y avait dans leurs chahuteries un enthousiasme touchant. Toute la semaine, cette phrase m'a accompagnée Je n'ai pas renoncé à la poésie, je voudrais que tu sois un peu bouquet de fleur ou saule tortueux, un peu funambule aux promenades terriennes, et j'avais la sensation que tous ces personnages étaient exactement ça : des funambules aux promenades terriennes. Après, j'ai démonté le chapiteau, nous avons quitté la scène, saluant les coulisses et ramassant les cheveux de fée que la nuit avait enroulés aux branches de lierre. Je sais que quelque part, dans d'autres âges, ma vie ressemblera à ça : un terrain vague et des cabanes à construire, faire et défaire, avec toujours la même trouille et le même désir. C'était mon premier brouillon, ma première répétition avec public et j'en garde d'incroyables lumières colorées... Alors c'est décidé, quand je serai grande, j'inventerai d'autres mondes à merveilles.
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