Dimanche 23 février 2014 à 11:58

Je trouve embarrassant d'embrasser.

Si je peux, puisque je suis là, je rembobine. Je viens d'un monde où poser ma main sur ton bras me semblait insurmontable, même pas envisageable. J'ai fui les autres, tous, leurs mots, leurs rires, le simple fait de leur existence. Je reviens de loin et je suis heureuse d'être arrivée jusque là.

Il m'a dit Joue-la sincère.


Je trouve embarrassant d'embrasser. Ça me fiche la pire trouille, je n'aime pas ça, jamais je n'ai autant la sensation d'être faible et vulnérable.

Je ne sais pas dire des choses gentilles, faire des compliments, comme si ces mots, si je les prononçais, pourraient être utilisés pour m'emprisonner. L'idée de dire ces mots m'étouffe, l'idée de confier cette pensée aimable que j'ai, cette idée m'étouffe alors je me tais et je ris aux éclats.
À quelques-uns je peux dévoiler des douceurs, ces quelques-uns dont je ne risque rien, parce que je suis apprivoisée.

Parfois faire la bise m'angoisse encore, saloperie de protocole, je préfère te taper dans les mains, dire bonjour et au revoir ce n'est pas mon fort.

Certes, je peux, désormais, te toucher le bras, te tresser les cheveux, créer des points de contacts qui sont restés si longtemps inexistants,
mais je galère toujours à être sincère.
À dire ce que je pense.

Oh souvent je parle trop, et c'est peut-être pour noyer quelque chose ou parce que je cherche autre chose et que je ne le trouve pas.
Je ne sais pas répondre aux questions simples, ni aux questions personnelles, j'élude. Ces questions là me déséquilibrent, je fais la sourde, je sème deux ou trois paillettes.

Je trouve embarrassant d'embrasser, personne ne m'en a encore donné le goût, parce que ça ne viendra que de moi. Embrasser c'est tout en haut dans mon échelle du pire.

Mais faire l'amour suit de près. Pardon, pas si près. Puisque je peux dire que j'ai envie de faire l'amour et que j'aime ça aussi. Mais je ne lâche jamais prise. Ton corps, cet inconnu, me crie des choses dans une langue que je ne comprends pas. Rien n'est naturel. Tout s'empêtre dans ma tête. Il neige. Un grand silence. C'est le carnaval des désirs, un terrible brouhaha de ce que je voudrais dire, de ce que j'aimerais faire. Rien ne sort. Je ne te mange ni ne te croque ni ne te lèche. Tu serais pourtant un parfait dessert. Dis bonjour à mon incompréhensible anorexie.

Tu connais l'exubérante, celle qui rit aux éclats, celle qui enfile des anecdotes sans intérêt dans le col d'une conversation, viens que je te présente la taiseuse. Des kilos de vérités bien trop lourds à porter, que je ne hisse pas à la surface : cet effort, je ne le maîtrise pas. Je ne sais pas faire. J'admire ceux qui. Savent. Ont la simplicité.

Je me soigne, mais il me reste un peu de complexité.

La taiseuse, tu ne la connais pas puisque moi-même j'ignore son début et ses faims. Mais ni toi ni toi n'êtes idiots : vous la devinez. C'est ce qui fait le personnage, son mystère, sa contradiction, son attraction.
Pour autant, j'ai parfois la sensation que tu prends tout cela un peu trop premier degré, il ne faudrait pas.

J'en connais peu, je crois même que je n'en connais pas, qui n'ont pas fait cas de la taiseuse, qui ne se sont pas laissés impressionnés.

Peut-être que je te sous-estime, que tu déjà sais tout ça, que tu as lu entre les lignes. Je ne risque pas de le savoir : si tu as suivi, je ne vais pas te demander.

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