Parfois je pleure des choses que je peux même pas raconter, pas répéter, pas épeler, même pas détourner. Elle, lui, eux, chut. Je pleure l'été qui sent si bon, qui est plein de promesses et de couleurs, il me pleut tellement d'envies et de désirs sur la peau que je deviens une tâche de rousseur géante, je vais encore rater toutes les marches de l'escalier et dégringoler au rez-de-chaussée. Entre deux sanglots je crie, à voix feutrée, par la fenêtre ouverte, je lance des appels de détresse à la nuit, je dis au secours au secours au secours, sans pause et sans fin, recroquevillée là avec cette peau qui tout à coup me démange, me démange partout. Je pleure de me sentir si bien dans mon corps mais d'avoir toujours la tête qui tourne parce que je ne mange pas, sous mes cheveux mes pensées se déroulent en allemand à une vitesse folle je suis pleine d'ivresse, je pleure ces ailes que je sens pousser à mon regard et que je vais brûler dans le soleil, j'ai soudain l'impression d'être claustrophobe, l'oxygène est saturé de chaleur j'ai les respirations comme un sac de nœuds, je touche compulsivement les murs de ma chambre; ils s'écroulent je le sens ils vont me tomber dessus, je veux tout arracher les mettre à nu qu'ils redeviennent blancs je veux disparaitre, il me faudrait des épaulettes de supère-héroïne pour sauver Margot qui ne sait plus du tout courir derrière Louise, Louise qui est en train d'exploser en arcs-en-ciels et Margot qui se noie dans ces horizons sans limite, Margot qui boit la tasse de peur amère et salée. Marre de dégringoler seule, toujours seule, on connait le refrain, tellement de visages de passage et tellement d'erreurs, toujours les mêmes, du sable qui nous file entre les mains, de l'air, de l'air, de l'air !
Dans l'histoire, il n'y a que des petites filles, pas de supère-héroïne, juste des petites filles qui voudraient réussir.
Dans l'histoire, il n'y a que des petites filles, pas de supère-héroïne, juste des petites filles qui voudraient réussir.